La CFDT en tenue de campagne

Tout en gardant sa "neutralité partisane ", le syndicat a décidé d'interpeller les candidats.
Par Muriel GREMILLET
Paru dans LIBERATION du mercredi 14 février 2007
 
Fini d'être au-dessus des partis, détachés des contingences de la campagne présidentielle. Les syndicats de salariés ont décidé de faire des incursions dans le débat, voire d'interpeller directement les candidats. Première à plonger, la CFDT qui a décidé de s'adresser aux cinq candidats de «gouvernement» à l'élection (Verts, PCF, PS, UDF et UMP) pour qu'ils prennent clairement position sur quatre thèmes jugés «urgents pour les Français : le travail, la cohésion sociale, l'Europe et la démocratie sociale.» 

Grève. Pas question pour autant de «donner des consignes de vote, affirme François Chérèque, le secrétaire général de la confédération. Les salariés n'attendent pas qu'un syndicat soit de gauche ou de droite». Mais il «faut éclairer les adhérents». Les candidats ont été contactés pour rencontrer Chérèque le plus rapidement possible. (lire plus bas). Tout en gardant sa «neutralité partisane», la CFDT a commencé à distribuer bons et mauvais points aux postulants à l'Elysée. Ségolène Royal est sommée de «préciser» son projet en matière de retraites ou de financement de la sécurité sociale professionnelle. Avec le candidat de l'UMP, Chérèque relève deux points de profonds désaccords : sur l'idée de «travailler plus pour gagner plus» ainsi que sa remise en cause du droit de grève «constitutionnel et individuel». 
La CGT pourrait, elle aussi, entrer dans la campagne, début mars. «En tant qu'organisation syndicale, nous allons apporter notre contribution au débat public, pour indiquer quels sont les domaines qui appellent des réformes structurelles», a déclaré Bernard Thibault, le secrétaire général de la CGT sur LCI. Comme Chérèque, Thibault s'est empressé d'expliquer que «la CGT n'a pas de candidat» tout en ayant le courage de dire que la centrale «ne sera pas neutre dans la campagne». 

Cette implication dans une campagne électorale est assez nouvelle. Chérèque l'explique aisément. «Nous avons un rôle dans la démocratie, comme corps intermédiaire. Nous avons lancé une campagne pour inciter les gens à voter. Il est logique de poursuivre, surtout quand la campagne part sur des thèmes sur lesquels on est légitimes : les salaires, l'emploi, la protection sociale.» Ce retour du social au coeur des débats justifie leur parole. «En 2002, tout s'est joué sur l'insécurité, ajoute-t-on à la CFDT. Aujourd'hui, on se trouve plus à l'aise pour parler. Mais méfions-nous tout de même, la campagne est longue.»

Méfiance. Surtout, les syndicats souhaitent habilement, presque préventivement, réaffirmer, qu'en dépit des annonces des uns et des autres, aucune réforme ne peut se faire sans eux. Comme sur les retraites, le temps de travail ou même la création d'une sécurité sociale professionnelle. D'autant plus que le gouvernement de Dominique de Villepin a fait voter une loi, qui prévoit une consultation des partenaires sociaux avant toute modification législative visant l'ordre public social. Mais les syndicats ont des raisons de se méfier : la droite, à peine la loi promulguée, s'était empressée de lancer le contrat première embauche.


Royal va rencontrer les syndicats

Dans son «pacte présidentiel» présenté dimanche, Ségolène Royal a annoncé son intention de travailler avec les partenaires sociaux, notamment sur la question des salaires ou des aides aux entreprises. Le premier acte est attendu pour la semaine prochaine : la candidate socialiste devrait rencontrer les leaders des centrales syndicales.